La Biennale d’Architecture de Venise 2025 : « Intelligens. Natural. Artificial. Collective »
Nouveaux horizons pour l’architecture contemporaine
Tous les deux ans, la Biennale d’Architecture de Venise s’impose comme un creuset d’idées, un laboratoire prospectif où se dessinent les grandes tendances de la discipline à l’échelle mondiale. L’édition 2025, placée sous le commissariat de Carlo Ratti, architecte et ingénieur visionnaire à la tête du Senseable City Lab du MIT, s’annonce comme l’une des plus stimulantes de la décennie. Le thème « Intelligens. Natural. Artificial. Collective » invite à une réflexion profonde sur la manière dont l’intelligence humaine, l’intelligence artificielle et l’intelligence naturelle peuvent converger pour façonner les espaces de demain.
Toute l’architecture en bois et biosourcée
Penser l’architecture à l’ère de l’intelligence collective
La thématique choisie par Carlo Ratti interroge la capacité de l’architecture à intégrer les avancées scientifiques et technologiques, tout en renouant avec les logiques du vivant et de la nature. Loin d’opposer l’humain et la machine, la Biennale 2025 propose d’explorer leurs synergies : comment l’architecture peut-elle tirer parti des algorithmes, des matériaux adaptatifs et de la modélisation numérique, tout en s’inspirant des écosystèmes naturels, de la résilience du vivant et des savoir-faire traditionnels ?
Ce questionnement s’inscrit dans une actualité brûlante : la crise climatique, la raréfaction des ressources, la nécessité de repenser les modes de production et d’habiter. Les matériaux biosourcés, la construction bois, la réhabilitation du bâti existant et la densification raisonnée s’imposent comme des réponses incontournables pour une architecture sobre, résiliente et inclusive.
« Vivre avec » : le Pavillon français, manifeste d’une architecture engagée
Sous la direction des architectes Dominique Jakob, Brendan MacFarlane, Martin Duplantier et Éric Daniel-Lacombe, le Pavillon français propose le projet « Vivre avec / Living with », véritable manifeste pour une architecture en prise avec les réalités contemporaines. L’exposition, structurée autour de six axes, offre une grille de lecture pertinente pour appréhender les enjeux du métier aujourd’hui :
- Vivre avec l’existant : La transformation du bâti, la réhabilitation et la reconversion d’infrastructures sont désormais au cœur des pratiques vertueuses. Il ne s’agit plus de raser pour reconstruire, mais de composer avec l’histoire, de préserver la mémoire des lieux tout en les adaptant aux exigences contemporaines, notamment en matière de performance énergétique et de confort.
- Vivre avec les proximités : L’urbanisme contemporain doit favoriser la mixité, la densité et la convivialité. La Biennale met en avant des projets d’habitat participatif, de quartiers écologiques et d’espaces publics interactifs, où la proximité devient un levier de cohésion sociale et de durabilité.
- Vivre avec l’abîmé : Catastrophes naturelles, conflits, obsolescence : l’architecture est convoquée comme outil de réparation et de résilience. La reconstruction post-catastrophe, l’usage de matériaux recyclés et les stratégies d’adaptation sont autant de pistes explorées pour répondre à l’instabilité croissante de nos sociétés.
- Vivre avec les vulnérabilités : Face à l’accentuation des inégalités et à la précarité énergétique, l’architecture doit se faire inclusive. La Biennale présente des solutions d’habitat social écologique, des dispositifs d’accueil temporaire et des modules adaptables, capables de répondre à l’urgence humanitaire et à la diversité des besoins.
- Vivre avec la nature et le vivant : La relation de l’architecture au vivant est repensée à travers des projets biophiliques, des villes-forêts, des systèmes constructifs favorisant la biodiversité. Il s’agit d’apprendre à cohabiter, à dialoguer avec les écosystèmes, à concevoir des bâtiments qui s’intègrent dans le cycle du vivant plutôt que de l’asservir.
- Vivre avec les intelligences réunies : L’architecture du futur sera celle de la convergence : intelligence humaine, artificielle et naturelle se rencontrent pour inventer de nouveaux processus de conception. L’usage des algorithmes, la simulation numérique, l’intelligence collective et l’apprentissage des dynamiques écosystémiques sont au cœur des explorations de cette édition.
Un espace en mutation : le Pavillon français en chantier
Particularité de cette édition : le Pavillon français, en rénovation, investit l’espace extérieur à travers une installation d’échafaudages. Cette structure éphémère, loin d’être un simple abri, symbolise l’esprit de la Biennale : un espace ouvert, en transformation, en dialogue permanent avec son environnement. Les visiteurs y découvrent une scénographie immersive, ponctuée d’interventions paysagères et d’expériences interactives, qui invitent à repenser la notion même d’habiter.
Innovations, matériaux biosourcés et résilience
La Biennale 2025 s’inscrit dans la continuité des éditions précédentes en mettant l’accent sur les matériaux biosourcés, la construction bois, le CLT, le réemploi et la circularité des ressources. Les pavillons nationaux rivalisent d’inventivité pour démontrer la pertinence de ces solutions, tant en construction neuve qu’en rénovation. L’accent est mis sur la résilience urbaine : gestion des eaux pluviales, infrastructures adaptatives, végétalisation, systèmes énergétiques décentralisés.
Biennale d’Architecture de Venise
Conférences, débats et résonances internationales
Au-delà des expositions, la Biennale propose un riche programme de conférences, de tables rondes et de workshops, réunissant architectes, urbanistes, ingénieurs, écologues, philosophes et spécialistes de l’intelligence artificielle. L’Institut français, partenaire de l’événement, prolonge la réflexion à travers des résonances en France et à l’étranger, affirmant la vocation internationale et prospective de la manifestation.
La Biennale d’Architecture de Venise comme boussole pour l’architecture de demain
La Biennale d’Architecture de Venise 2025 s’impose comme un espace d’expérimentation, de dialogue et de prospective, où se dessinent les contours d’une architecture en phase avec les défis contemporains. Pour les architectes, urbanistes et professionnels du bâtiment, elle offre une occasion unique de s’inspirer, de questionner leurs pratiques et de s’engager dans la construction d’un avenir plus collectif, plus résilient et plus intelligent.
Maxime Simonin